C'était sur Aqui! : Les habitants de Carriet, entre rupture et continuité

Carriet

La Rive Droite vue d’ailleurs. En partenariat avec Aqui.fr, un regard sur 10 ans de projets de rénovation urbaine sur le territoire du GPV Rive Droite. Retour en 2008 dans le quartier Carriet à Lormont…

Les habitants du quartier Carriet à Lormont, vivaient encore, il y a à peine un an, dans des conditions qu’on pourrait, sans exagérer, qualifier d’extrêmes : pannes répétitives de chauffage central, présence de rats, bâtiments vétustes. Si personne ne regrette les vieux immeubles, les avis sur les appartements flambants neufs construits seulement à quelques pas des anciens, sont contrastés.

En dehors de la question du loyer, légèrement supérieur, ce sont surtout plusieurs détails techniques et solutions d’aménagement qui « pourrissent la vie »comme l’avoue François, 44 ans, locataire d’un F3. Par exemple, le fait de devoir payer pour des espace verts qui n’existent pas ou pour un ascenseur dont se servent les voisins de l’immeuble d’en face, les entrées qui ne sont pas adaptées aux handicapés ou aux poussettes.
Martial, 30 ans, pâtissier actuellement au chômage, bricole sa Vespa dans un local à vélo qui donne sur la rue. Lorsqu’on lui demande ce qu’il pense du relogement, il commence une longue liste de maux et critiques que sa femme, Nadège, nous invite néanmoins à relativiser, Martial ayant un côté un peu « râleur ».

« Il suffit juste de regarder l’entrée » s’indigne Martial « Je vois mal comment une mamie sur une fauteuil roulant ou une mère avec sa poussette pourraient monter cet escalier. » L’escalier semble déjà en soi difficile à gravir. « L’évacuation de l’eau sur le balcon, elle est à 20 cm du sol, alors je peux me faire tranquillement une petite baignoire de temps en temps. » Et la « lithanie » continue avec des carreaux qui ne tiennent pas, un parking censé être « sous vidéo-surveillance » où l’on rentre comme dans un moulin, etc.

Un bond en avant

Cependant, tout le monde ne partage pas l’avis de Martial, du moins pas à ce point là. « On se rappellera toujours des temps où il faisait 13 dégrés dans l’appartement quand la chaudière de l’immeuble ne marchait plus » témoigne un des habitants des vieux immeubles détruits.

Nicolas travaille dans une entreprise de mécanique industrielle à Bassens. C’est un des premiers locataires des nouveaux bâtiments construits à Carrier. Il y vit avec sa compagne et leur fille depuis 18 mois, contents d’habiter dans du neuf. Seule ombre au tableau, la grosse facture d’eau : 100 euros par mois, une grosse consommation qu’il explique par le fait qu’ils prennent beaucoup de bains. Il remarque déjà des dégradations dans les parties communes, des tags dans l’ascenseur. « Ca risque de mal vieillir », estime-t-il. Mais la satisfaction domine. « On a eu de la chance ».

Pour la plupart des habitants, le problème majeur intervient au niveau des finitions. Les bailleurs ne semblent pas du tout pressés d’apporter les réparations nécessaires. « On s’était donné rendez-vous huit fois pour réparer un truc, ils ne sont jamais venus » raconte Martial. « Les appartements sont très mal finis. » constate Louisette, mère de deux enfants. « Il y a déjà de la moisissure, des fuites ; ça se voit qu’ils ont fait les choses très vite. »

Des voisins qui vous suivent

Mais le constat le plus frappant est que, contrairement aux ambitions de mixité sociale affichées par le projet GPV, les locataires des nouveaux logements sont exactement les mêmes que dans les vieux bâtiments. « On connaissait presque tout le monde ici, quand on est venu dans les nouveaux bâtiments. » raconte Martial. « On a été pratiquement tous relogés au même endroit. » Mais un peu plus loin dans la conversation, il remarque que certains locataires sont des nouveaux venus « qui se repèrent tout de suite, car ils n’ont pas la mentalité du quartier. » La mixicité sociale n’a visiblement rien d’évident…

Le sentiment de « s’être fait avoir »

La question des abonnements d’eau et de gaz qui ne sont plus compris dans les charges a été l’objet de malentendus qui, aujourd’hui, passent mal. « On entend déjà parler de gens qui veulent déménager, parce que pour eux c’est trop cher » affirme Nadège. « On s’est fait tous avoir » confirme Louisette. « On nous a menti tout simplement. » s’écrie Martial. « Personne ne nous avait parlé de charges supplémentaires. » Et d’ajouter que le bailleur les considère parfois avec une certaine condescendance : « On devrait être déjà content d’habiter dans du neuf. » Malgré ses « râleries » sur le terrain, bien peu de réclamations sont parvenues ce jour en mairie de Lormont.

Piotr Czarzasty, 9 avril 2008, pour Aqui!

Et aujourd’hui, comment vit-on à Carriet ? Si vous désirez témoigner, n’hésitez pas à le faire dans les commentaires…

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